le fantôme des roselières
(butor étoilé - botaurus stellaris, Les Valliers, Sinard, Isère, le 20 mars 05)
« A la moindre alerte, il s’amincit, s’allonge silencieusement, se raidit en tendant le cou presque verticalement, le bec pointant vers le ciel, face à l’importun. Des heures durant, il peut rester figé dans cette attitude, car il est très craintif et méfiant : sait-il peut-être qu’il ressemble ainsi davantage à une vieille touffe de roseaux qu’à un oiseau ? » Paul Géroudet, in Les Echassiers, Delachaux & Niestlé, 1948.
Nous étions partis célébrer le gai printemps, à la recherche des tritons dans ces mares serties sous les collines effondrées. A la noce, c’est un butor étoilé qui vola finalement la vedette aux amphibiens. La Nature est imprévisible. On ne sait jamais quel animal elle va poser sur notre chemin. Il y a des choses écrites dans le ciel, il suffit de suivre les chiffres du calendrier pour se faire une idée assez précise du script – cela tant que l’homme n’a pas changé l’ordre des fiches. Mais les acteurs, insectes, oiseaux, mammifères, surgissent à leur guise, comme le mystère l’a décidé. Le butor étoilé, migrateur partiel, n’était peut-être pas ici sur son quartier de nidification : cet oiseau essentiellement nocturne préfère les roselières profondes. Pourtant sa route a bien voulu croiser le chemin de notre quête passionnée : c’est le miracle de la rencontre entre l’instinct animal et la conscience humaine (ou à peu près).
(id., photographié en digiscopie, merci à Jibé pour l'aide précieuse à cette seconde photo - cliquer pour agrandir)