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avant la lettre
7 novembre 2004

cette pensée qui ne vient pas

Dans son dernier ouvrage Ce Monde Qui Vient, l'économiste libéral de gauche Alain Minc semble vouloir dissocier les destins de l'humanité et de la nature. Dans une violente diatribe contre José Bové (pour lequel je n'ai moi-même guère de sympathie), l'essayiste interprète le goût de la nature comme symptomatique du manque de confiance de l'homme en lui-même. D'une chiquenaude, il condamne la passion des forêts au même titre que la croisade anti-OGM ou la peur du nucléaire, motivées selon lui par une identique pulsion de peur face au progrès scientifique et technique. Un refuge d'obscurantistes rétifs au développement, une tanière d'ours mal léchés, archaïques et faussement humbles, voilà à quoi ressemble l'écologie selon Alain Minc. Pourtant, cette science ne se résume pas à la défense des ours des Pyrénées ou des papillons des marais et ceux qui tentent d'en innerver les valeurs dans la réflexion globale sur le devenir de l'homme (car il n'est question que de cela au fond) n'ont pas tous la barbe fleurie ni ne se chauffent au bois. Encore une fois dans un ouvrage d'analyse, la nature est intellectuellement sacrifiée. Elle n'est observée ici qu'à travers un prisme utilitariste, fonctionnel et désincarné, à l'exclusion de toute autre unité de valeur. Cette image instillée sous la plume d'Alain Minc renvoie finalement à la conception qu'il nourrit de son prochain. Il assimile ainsi l'homme à une machine économique en mouvement, qui se déplace et se concentre vers les pôles de croissance planétaires (USA, Europe de l'Ouest et maintenant migrations d'un bout à l'autre de la Chine). Jamais il ne l'envisage comme un être doué de sentiments, jamais il ne le voit mû par des considérations autres que matérielles. Le sociologue intègre la défaite culturelle de l'homme dans sa prospective. Persister à croire que seule l'industrie est capable de pourvoir à l'ensemble de nos besoins – Alain Minc est fondamentalement un industrialiste – c'est la marque flagrante que cet élitisme français, imbibé de partialité et de présomption, reste à repenser.

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Commentaires
L
et pourtant... l'essentiel est *ailleurs* ;)
Y
Le problème avec les économistes, c'est qu'ils croient que leur science est une science exacte.<br /> Une annéen ils écrivent un livre et l'année d'après un autre pour dire qu'ils se sont trompés dans le précédent..etc..<br /> Alors s'ils sont très bien placés auprès des grands patrons, ils vont quand même pas cracher dans la soupe ou dire qu'ils n'en savent fichtrement rien les Minc, Elie Cohen, Michel Godet, Camdessus etc... <br /> <br /> Les livres de Minc sont tièdes, mous.. ils ne m'éxcitent pas.. lol<br /> <br />
D
Je disais ca en passant, je sais bien que non.<br /> <br /> J'ai l'impression depuis quelques temps que le bon sens est une valeur de moins en moins bien repartie... °°o_O°°
R
Ben non justemoi, la spontanéité, ça a du bon ! :-) Il faut seulement remarquer que les économistes "en vue" ont tous la même vision du monde. Les autres rédigent des blogs... L'écodiversité, comme la bio du même substantif, est gravement menacée.
R
Belle analyse, Emmanuel, et comme je la partage quand tu abordes la (les) nature(s)... Minc fait donc du clientélisme, tronque la vérité pour mieux séduire ses donneurs d'ordre. Le mage qu'il se prétend être n'a pas peur du ridicule et sait faire oublier ses précédents échecs. Notamment en 2000, quand il annonçait l'avènement durable du plein-emploi en France...
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